Les acteurs de la négociation collective
Qu'est-ce qu'une branche professionnelle ? Quel rôle jouent les partenaires sociaux ? Quelles sont les missions et la composition des différentes commissions paritaires ? Quels organismes sont habilités à assurer les risques liés à la protection sociale complémentaire ? Découvrez ici les rôles respectifs des différents acteurs intervenant dans le cadre d’une négociation de branche en protection sociale complémentaire.
Les branches professionnelles
Une branche regroupe l’ensemble des entreprises d’un même secteur d’activité. Le périmètre d’une branche est défini dans sa convention collective qui est pilotée par les organisations syndicales de salariés et d’employeurs.
Le code du travail ne distingue pas branche et profession. On peut toutefois admettre que la branche est susceptible d’englober plusieurs professions.
Il y a donc lieu, lorsque l’on est en présence d’une branche subdivisée en professions, d’être précis sur le champ d'application exact des accords que l’on met en place mais aussi sur la manière dont vont s’organiser les rapports entre eux.
Le champ d'application des conventions collectives est déterminé par la nature de l’activité (code APE ou NAF). Il ne faut toutefois pas surestimer l’importance du code APE puisqu’il n'indique qu'une présomption d'appartenance au champ d'application d'une convention collective.
Il convient de distinguer la convention collective de l’accord collectif. La convention collective régit l’ensemble des relations individuelles et collectives de travail au sein de la branche alors que l’accord collectif ne traite que d’un ou plusieurs sujets précis (la prévoyance par exemple) - Article L.2221-2 du Code du travail.
Les accords de branche peuvent être conclus tant au plan national qu'au plan régional, voire départemental. Ils couvrent l’ensemble des entreprises dont l’employeur est syndiqué (adhérent) d’une organisation patronale ou syndicale signataire de l'accord. Lorsque l’accord est étendu par le ministère, il couvre également les entreprises dont l’employeur n’est pas adhérent à une organisation signataire.
Intervention de Jacques Barthelémy, à la Rencontre Culture branches du 10/12/20, sur le thème : « Protection sociale complémentaire, instrument d'identification de la branche professionnelle ? La branche, lieu de construction de politiques collectives par ceux qui la composent.
Intervention de Jacques Barthelémy, à la Rencontre Culture branches du 10/12/20, sur le thème : « Protection sociale complémentaire, instrument d'identification de la branche professionnelle ? La branche, lieu de construction de politiques collectives par ceux qui la composent. »
Les partenaires sociaux
Les régimes de protection sociale instaurés au niveau des branches professionnelles sont négociés par les partenaires sociaux. Les partenaires sociaux regroupent les représentants des syndicats de salariés et des organisations patronales.
Les partenaires sociaux sont au centre des politiques en matière d’emploi, de relations du travail ou encore de formation professionnelle :
- au niveau national avec les grandes négociations interprofessionnelles ;
- dans les branches professionnelles, par exemple, pour l’instauration d’un régime de protection sociale complémentaire ;
- dans les entreprises elles-mêmes.
Les syndicats de salariés et les organisations patronales, en complément de la représentation de leurs membres, ont la capacité à négocier des accords qui sont créateurs de droit dans le champ d’application professionnel et/ou géographique concerné.
La validité et la légitimité des accords de branche conclus reposent sur la représentativité des acteurs de la négociation.
L’article L.2232-6 du Code du travail prévoit que la validité d’un accord professionnel est subordonnée :
- à sa signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés lors des élections professionnelles ;
- et à l’absence d’opposition d’une ou de plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés, quel que soit le nombre de votants.
L'opposition doit être exprimée dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de cet accord.
La loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail, complétée par la loi du 15 octobre 2010, a mis fin à la présomption indiscutable de représentativité et fonde la légitimité des syndicats de salariés sur les suffrages de ces derniers.
Au niveau de la branche, pour être représentatif un syndicat doit à la fois :
- avoir recueilli au moins 8% des suffrages exprimés au sein de la branche ;
- respecter les autres critères de représentativité : le respect des valeurs républicaines, l’indépendance, la transparence financière, l’ancienneté minimale de deux ans, l’influence (activité et expérience), les effectifs d’adhérents et les cotisations ;
- disposer d’une implantation territoriale équilibrée.
La représentativité des organisations patronales
Les lois du 5 mars 2014 et du 8 août 2016 ont créé pour la première fois un cadre juridique pour la représentativité patronale pour la négociation collective.
L’objectif poursuivi était de conforter la place reconnue aux partenaires sociaux dans l'élaboration des normes applicables aux entreprises et aux salariés, tant au niveau national et interprofessionnel qu'au niveau des branches professionnelles.
Le critère de l’audience, primordial dans la détermination de la représentativité, a cependant été adapté à la spécificité des organisations d’employeurs. Il est ainsi apprécié au regard de leur capacité à attester qu’elles comptent comme adhérents :
- au moins 8% des entreprises adhérant à des organisations d’employeurs satisfaisant aux critères 1° à 4° de l'article L. 2151-1 du code du travail et ayant fait acte de candidature au niveau concerné (branche ou national et interprofessionnel);
OU
- que leurs entreprises adhérentes emploient au moins 8% de l'ensemble des salariés employés par l'ensemble des entreprises adhérant à des organisations d’employeurs satisfaisant aux critères précités et ayant fait acte de candidature.
Les commissions paritaires
Pour la négociation et le suivi des accords au sein des branches professionnelles, les représentants des organisations syndicales de salariés et patronales sont réunis au sein de plusieurs commissions où ils sont représentés de façon paritaire.
Composition
La commission doit être composée d'autant de représentants des organisations syndicales de salariés représentatives dans la branche que de représentants des organisations patronales. Chaque organisation a ainsi vocation à désigner un titulaire et un suppléant.
La composition de cette commission peut être modifiée par accord de branche (experts, nombre plus important de participants, etc.) étant entendu que l'accord de branche doit définir le rôle des experts (voix consultative ou délibérative).
La commission paritaire (composée de représentants des partenaires sociaux habilités à négocier au niveau de la branche professionnelle) ne dispose pas en tant que telle, de la personnalité morale et donc de moyens en personnel qui lui soient propres ou encore d'un budget de fonctionnement.
Missions
La Commission doit vérifier que l'accord « n'enfreint pas les dispositions législatives, règlementaires ou conventionnelles applicables» (L. 2232-22 du code du travail).
Concrètement, la commission paritaire de branche doit procéder à un contrôle de forme (respect des conditions de négociation de l'accord avec les élus et d'approbation de l'accord) ainsi qu'à un contrôle de légalité ou de « conventionnalité» de l'accord.Le contrôle porte sur le contenu de l'accord.
La commission paritaire prévue au premier alinéa de l'article L. 2261-19 du code du travail est chargée de la procédure de mise en concurrence pour les clauses de recommandations. A ce titre, elle s’assure du respect des principes de transparence de la procédure, d'impartialité et d'égalité de traitement entre les organismes candidats, ainsi qu'à chaque réexamen de la clause de recommandation, entre le ou les organismes déjà recommandés et les autres organismes candidats.
Exemple : La commission paritaire nationale de la Pâtisserie artisanale
Les négociations peuvent se dérouler en commission mixte c'est-à-dire en commission présidée par un représentant du ministre.
Le ministre en charge du Travail peut provoquer la réunion d'une commission mixte soit à la demande d'une organisation syndicale, soit, à tout moment, de sa propre initiative.
Le ministre est, par ailleurs, tenu de convoquer cette commission lorsque deux organisations en font la demande (L. 2261-20 du code du travail).
L'objet de la commission mixte paritaire est d'aider à la négociation de textes conventionnels de branche susceptibles d'extension, en facilitant le dialogue social avec l'aide d'un tiers apportant sa compétence technique et juridique.
Le président, qui a un rôle pédagogique, offre un cadre de discussion et assure le respect des "règles du jeu" de la négociation, sans se substituer aux négociateurs dans les débats de fond.
Une commission paritaire permanente de négociation et d’interprétation est instituée dans chaque branche.
Composition
Les CPPNI sont, comme leur nom l'indique, des instances paritaires. Elles sont composées, en nombre égal, de représentants de la partie patronale et de représentants de la partie salariée. Que ces commissions soient dites paritaires impose en effet que chacune des parties, patronale et salariée, doit y avoir le même nombre de représentants.
L'article L. 2232-9 du code du travail ne donne aucune autre précision quant à la composition des commissions, composition qu'il revient par conséquent aux parties à l'accord ou à la convention de déterminer librement.
Les partenaires sociaux instituant une CPPNI doivent donc décider de sa composition ainsi que des représentants qui y siègeront.
Missions
Les CPPNI exercent diverses missions d’intérêt général listées par le texte :
- elles représentent la branche, notamment en appui des entreprises et vis-à-vis des pouvoirs publics ;
- elles exercent un rôle de veille sur les conditions de travail et l’emploi ;
- elles établissent un rapport annuel d’activité qui comprend un bilan des accords conclus et leur impact. Ce rapport est publié dans la base de données nationale des conventions et accords collectifs.
Pour pouvoir être étendus, les textes conventionnels doivent avoir été négociés au sein de la CPPNI.
Les institutions de prévoyance, mutuelles, sociétés d'assurance et protection sociale complémentaire
En France, 3 types d’organismes sont habilités à assurer les risques liés à la protection sociale complémentaire : les Institutions de prévoyance, les Mutuelles et les Sociétés d’assurance (Article 1 Loi Evin du 31 décembre 1989).
Les institutions de prévoyance sont des personnes morales de droit privé qui poursuivent un but non lucratif. Elles sont régies par le Code de la Sécurité sociale.
Les Institutions de prévoyance sont administrées paritairement par les partenaires sociaux (représentants des salariés et des employeurs) qui agissent dans l’intérêt des entreprises adhérentes et des salariés participants.
Elles assurent et gèrent des contrats collectifs d’assurance de personnes, souscrits par les entreprises au bénéfice des salariés, dans le cadre exclusif des accords d’entreprises ou de branches professionnelles.
Les institutions de prévoyance proposent des garanties en complément des prestations de la Sécurité sociale pour les risques maladie, incapacité de travail, invalidité, dépendance, et décès.
Les excédents peuvent servir à :
- renforcer la sécurité des engagements,
- améliorer le niveau des garanties et la qualité des services,
- financer l’action sociale.
Les Mutuelles sont des groupements de personnes à but non lucratif régis par le Code de la mutualité. Elles ont généralement vocation à proposer la souscription de complémentaires santé.
Les Mutuelles sont directement gérées par leurs assurés, chaque adhérent dispose d’une voix à l’Assemblée générale ou pour élire les délégués à l’Assemblée générale. La gestion se fait dans l’intérêt de ses membres.
Les excédents peuvent servir à :
- renforcer la sécurité des engagements,
- améliorer le niveau des garanties et la qualité des services,
- financer l’action sociale.
Les sociétés d’assurance sont constituées sous la forme de sociétés de capitaux permettant la réalisation de profit et la rémunération d’actionnaires.
Les contrats conclus auprès des sociétés d’assurance sont régis par le Code des assurances. Ce dernier n’encadre pas la représentation des assurés et des souscripteurs aux instances de gouvernance.
Les sociétés d’assurance proposent des garanties en complément des prestations de la Sécurité sociale pour les risques maladie, incapacité de travail, invalidité dépendance et décès.
Les excédents peuvent servir à :
- renforcer la sécurité des engagements,
- améliorer le niveau des garanties et la qualité des services,
- rémunérer les actionnaires.
Les sociétés d’assurance peuvent également être établies sous la forme de sociétés d’assurance mutuelles à but non lucratif, soumises au Code des assurances. Constituées sur le mode mutualiste, elles sont administrées par les représentants des sociétaires (cf. les assurés).