Retour du 17:30 Culture branches sur le thème "Dérèglement climatique, conditions de travail et compétences"

Le 8 octobre, Culture branches a réuni experts et acteurs des branches professionnelles pour discuter de l'impact du dérèglement climatique sur les conditions de travail et les compétences futures, offrant des analyses et témoignages éclairants.

Publié le mardi 19 novembre 2024

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Crédits photo : Xavier Renauld
De gauche à droite : Stéphane Radet, Christian Crétier, Pascale Soyeux, Virginie Raisson-Victor, Bruno Angles

 

 

 

En ouverture de 17:30 Bruno Angles, Directeur général d'AG2R LA MONDIALE, a réaffirmé le très fort attachement du Groupe aux branches professionnelles et à la « démarche de co-construction qui fonde notre action ».

« Dans l’adaptation face au dérèglement climatique, les partenaires sociaux jouent un rôle central »

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« Avec près de 110 accords de branches couvrant 350 000 entreprises et 4 millions de salariés issus de secteurs d’activité variés, AG2R LA MONDIALE se positionne comme un partenaire incontournable des branches professionnelles. 

Les rendez-vous réguliers de Culture branches offrent des temps d’échanges et de réflexion collective dans un cadre paritaire, sur des sujets d’actualité qui font écho aux préoccupations des négociateurs de branches, et donc des salariés et des entreprises. C’est dans ce cadre que nous avons abordé la question centrale de l’adaptation nécessaire pour faire face au changement climatique.


Notre engagement est double : à la fois atténuer les conséquences du changement climatique sur les conditions de travail et renforcer l’adaptation des régimes sociaux, afin de mieux protéger les personnes les plus exposées, que ce soit sur le terrain ou dans des secteurs sensibles. Ensemble, nous continuerons à trouver des solutions innovantes, à associer nos administrateurs et partenaires pour répondre à ces défis.


Nous avons par exemple déployé des actions concrètes telles que des initiatives pour sensibiliser les entreprises aux problématiques climatiques et sociales, comme le trophée RSE qui valorise les engagements en développement durable dans des secteurs comme la boulangerie. Nous accompagnons également nos clients, notamment les TPE, dans la mise en place de démarches RSE à travers le programme "TPE pour Demain", qui mobilise des équipes sur le terrain pour aider à définir des plans d'action adaptés.


Dans l’adaptation face au dérèglement climatique, les partenaires sociaux jouent un rôle central. Grâce à leur expertise et à leur implication dans la gouvernance paritaire, ils permettent d’adapter les régimes de protection aux réalités de chaque secteur, tout en répondant aux nouvelles exigences économiques et environnementales.

 

 

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Au sein du groupe AG2R LA MONDIALE, notre ambition est claire : continuer à co-construire avec les branches des régimes de protection sociale vertueux, solidaires et adaptés aux spécificités de chaque métier. Cela passe par un engagement quotidien aux côtés des partenaires sociaux, en conjuguant notre expertise à leur connaissance fine des enjeux des filières.


Je suis heureux que les événements Culture branches contribuent à fédérer une véritable communauté et à enrichir la réflexion de chacun sur les grandes problématiques de notre époque ». 

 

 

 

 

Dérèglement climatique : les chiffres clés

•    En 2022, les journées écourtées, les malaises et les problèmes de sécurité liés à la chaleur ont représenté la perte de 490 milliards d’heures de travail dans le monde, soit 863 milliards de dollars (source : The Lancet).
•    D’ici à 2030, 2% des heures de travail seront perdues dans le monde du fait de températures insoutenables, soit l’équivalent de près de 80 millions d’emplois à temps plein (source : OIT).
•    En France, entre 2017 et 2022, 54 personnes sont mortes au travail à cause du phénomène dit de stress thermique.

Eclairage d'expert : Virginie Raisson-Victor, Président du GIEC Pays de la Loire

« En modifiant profondément les environnements, le dérèglement climatique affecte et affectera les conditions de travail des salariés. » 
 
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À quels risques climatiques les entreprises doivent-elles faire face aujourd’hui ?

 

« Le changement climatique fait peser sur les entreprises des risques multidimensionnels, tant physiques que financiers et sociaux. Ce sont tout d’abord les risques directs associés aux événements extrêmes — inondations, incendies, tempêtes… —, qui peuvent endommager les infrastructures, perturber les chaînes d’approvisionnement et réduire la capacité de production, voire entraîner une cessation d’activité. En parallèle, on observe une hausse des primes d’assurance liées à ces événements, qui représentent une charge financière croissante pour les entreprises. 

D’autre part, les consommateurs sont de plus en plus sensibles aux questions environnementales. Une entreprise qui n’adapte pas ses pratiques pour abaisser son empreinte carbone s’expose à des risques réputationnels et juridiques, ainsi qu’à des difficultés de recrutement. Enfin, le dérèglement climatique affecte directement la santé des salariés, notamment en raison du phénomène de stress thermique, qui devient un risque professionnel majeur. »


En quoi consiste le stress thermique et quels sont ses effets concrets sur la santé ?

 

Quand la température extérieure est élevée, le corps humain se refroidit naturellement en évacuant l’excès de chaleur par la transpiration et l’augmentation du flux sanguin vers la peau. Or, ces mécanismes sont inefficaces en cas de fortes chaleurs, notamment couplées à un taux d’humidité important — qui empêche la sueur de s’évaporer. Lorsque l’organisme ne parvient plus à maintenir sa température à 37 °C, le stress thermique se produit.


Le seuil critique pour la santé se situe à 38 °C de température ambiante et 60 % d’humidité. Des niveaux plusieurs fois dépassés dans le monde ces dernières années et déjà approchés dans l’Hexagone. Concrètement, une température corporelle excédant 38 °C peut provoquer crampes, courbatures, sensation de fatigue et déshydratation, et entraver la capacité de raisonnement. À 40,6 °C, les probabilités de malaise, de lésions organiques, voire de décès, sont accentuées. 


D’autres facteurs peuvent renforcer l’intensité du stress thermique, comme la vitesse du vent, la chaleur rayonnante, mais aussi l’état de santé de l’individu, son âge ou encore la nature de son métier. En toute logique, les secteurs les plus touchés sont ceux où l’activité s’exerce en extérieur — agriculture, construction, collecte de déchets, transports, tourisme… Sont également exposés les employés qui travaillent dans des usines ou des ateliers non ventilés ou climatisés, dans les cuisines ou près des fours de cuisson, dans les verreries, cristalleries et fonderies…


Enfin, il est essentiel de rappeler que les salariés plus âgés sont aussi plus vulnérables. À partir de 50 ans, la résistance physiologique est moindre et la température corporelle se régule plus difficilement. Sans compter la présence de pathologies, en particulier cardio-vasculaires, plus fréquentes dans cette catégorie. Avec le vieillissement de la population et le report de l’âge de départ à la retraite, l’accroissement de la part des seniors dans les effectifs constitue un défi supplémentaire pour les entreprises, qui doivent impérativement prendre en compte la protection de ces travailleurs dans leurs mesures d’adaptation au réchauffement climatique.


Outre le stress thermique, quels sont les autres risques pour la santé des salariés ?

 

En modifiant ensemble l’environnement et les conditions de travail des salariés, le dérèglement climatique les expose à plusieurs types de risques. 


Le risque chimique tout d’abord, car la chaleur rend plus volatiles les substances toxiques susceptibles d’être inhalées par les travailleurs qui les manipulent. Elle accroît d’autre part le risque biologique, en favorisant par exemple la pollution à l’ozone — gaz qui endommage le tissu pulmonaire — ou le déclenchement d’incendies — qui libèrent des microparticules tout aussi nocives pour l’appareil respiratoire. En transformant les écosystèmes, le changement climatique favorise également la propagation des maladies infectieuses. 


Autre effet notable : les risques accrus de troubles psychosociaux. En cas de fortes chaleurs, la fatigue psychologique tend à réduire le niveau de tolérance et peut donc générer ou exacerber les tensions dans les relations de travail. Par ailleurs, la santé mentale des travailleurs peut être fortement perturbée par la menace d’arrêt contraint de l’activité ou de pertes de revenus. Cette anxiété touche particulièrement le secteur agricole, mais aussi les artisans du BTP.


Enfin, les températures élevées augmentent le risque d’accidents du travail en altérant les fonctions cognitives. La baisse de la vigilance et l’allongement du temps de réaction entraînent un plus grand risque d’erreur, que vient accentuer le phénomène des « nuits tropicales » où le thermomètre ne redescend pas en dessous de 20 °C, limitant ainsi la récupération du corps humain. Dans certaines catégories de métiers, comme les chauffeurs-livreurs ou les salariés qui travaillent en hauteur, le risque d’accident est amplifié. 


Quelles mesures les employeurs peuvent-ils mettre en place pour protéger leurs salariés ?

 

Le réchauffement climatique rend indispensable l’adaptation des entreprises, en matière d’équipement comme d’organisation, ainsi que le développement de compétences spécifiques. Il s’agit tout d’abord d’identifier et d’évaluer les risques et les systèmes d’alerte, secteur par secteur, en y associant les travailleurs et leurs représentants. La mise en place de dispositifs de prévention et de prise en charge du stress thermique doit également être envisagée dans le cadre de l’entreprise, avec les partenaires sociaux, tout comme la formation continue autour de ces nouveaux enjeux sanitaires. 


Il est par ailleurs essentiel de repenser la conception et la performance des outils de travail en fonction de leur incidence sur les salariés, et d’améliorer les systèmes de climatisation, de ventilation et de refroidissement, tout en réduisant leur impact énergétique et leur coût financier. La régulation de la température des locaux doit devenir une discipline à part entière, une expertise qui couvre à la fois l’aménagement de lieux de rafraichissement, de dispositifs réfléchissants ou d’ombrières, mais aussi l’adaptation des équipements, de l’éclairage, des matériaux manipulés ou encore des vêtements de travail. Pour finir, l’ajustement des horaires, des méthodes et des charges de travail sera un élément clé pour la préservation de la santé et des conditions de travail des salariés. 


Il y a urgence à s’emparer du sujet. La prise en compte de ces nouveaux risques professionnels doit être partagée par toutes les parties prenantes et portée par le dialogue social autant que par la législation. Dans ce domaine comme tous les autres, la crise climatique requiert une mobilisation collective ».

Le travail à l’épreuve du changement climatique 

•    À l’échelle mondiale, l’exposition à la chaleur occasionnerait plus de 650 milliards d’heures de travail perdues par an, soit l’équivalent de 148 millions d’emplois à temps plein.(1)
•    La productivité du travail chuterait de 50 % en moyenne dès 33-34 °C, et ce, même avec une intensité de travail modérée (peu de charges lourdes à porter, faibles efforts physiques, etc.). (2)

 

(1) « Global labor loss due to humid heat exposure underestimated for outdoor workers », Parsons L. A. et al., Environmental Research Letters, 2022.
(2) Rapport de l’Organisation internationale du travail « Working on a warmer planet. The impact of heat stress on labour productivity and decent work », 2019.

Témoignages de négociateurs de branches


Christian Crétier
Secrétaire national de la Fédération Générale des Travailleurs de l’Alimentation, des Tabacs et des services Annexes (FGTA), Président du Pôle Alimentaire d’AG2R LA MONDIALE
 

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« Il faut mettre l’adaptation des conditions de travail au centre des débats en entreprise. »

 


« Pour agir, il faut comprendre. Aujourd’hui, les administrateurs du Pôle alimentaire ont compris. Notre pôle est un laboratoire d’idées et le dérèglement climatique figure parmi les priorités que les administrateurs ont retenues.


Éviter et évaluer les risques, les combattre à la source, tenir compte de l’évolution de la technique, adapter le travail à l’homme, remplacer ce qui est dangereux par ce qui ne l’est pas ou ce qui l’est moins, prendre des mesures de protection collective et donner des instructions appropriées… : c’est un sujet sur lequel il faut avoir une approche holistique.


Malheureusement aujourd’hui, les entreprises et les salariés sont mobilisables sur le sujet, mais pas encore suffisamment mobilisés. Pour notre fédération, deux actions pourraient être mises en œuvre : équiper les branches d’un guide de bonnes pratiques, sans attendre des obligations européennes ou nationales, et donner des repères aux négociateurs via nos réseaux de communication. A ce sujet, nous avons commencé par initier tous les membres du Pôle Alimentaire aux enjeux climatiques à travers La Fresque du Climat. 


Parmi les bonnes pratiques à initier ou systématiser : changer les horaires de travail en période de canicule, renforcer le plan de prévention par une évaluation plus fine des risques professionnels générés par le changement climatique, mettre à disposition des boissons fraîches pour les salariés, car tout le monde ne le fait pas, ainsi que des actions à mettre en place au niveau des entreprises comme privilégier le vélo ou la voiture électrique et favoriser le covoiturage.


Il faut mettre l’adaptation des conditions de travail au centre des débats en entreprise. La tâche est particulièrement dense : identifier le périmètre, les managers à mobiliser et à former, imaginer et tester des solutions pérennes, transposables localement et adaptées à différents secteurs, sensibiliser le plus grand nombre de personnes à tous les niveaux.


Ces problématiques ne concernent plus seulement les postes de travail en extérieur, mais progressivement tous les métiers. Nous serons aux côtés des entreprises pour les accompagner dans cette évolution urgente et plus que nécessaire. »

 


Stéphane Radet 
Directeur du Syndicat National de l’Industrie de la nutrition Animale (SNIA)
 

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« Dans des organisations raisonnant encore trop en silos, les démarches RSE apportent de la transversalité. »


« Sécuriser nos approvisionnements, assurer la continuité de nos activités, fournir les élevages et répondre à toutes les attentes jusqu’aux consommateurs… en complément de ces objectifs le secteur veille et travaille aux exigences de sécurité sanitaire et aux objectifs de réduction des impacts environnementaux et d’adaptation aux conséquences du dérèglement climatique. La définition et la conduite d’une démarche RSE a permis d’adopter une vision transversale au service de notre raison d’être : bien nourrir les animaux pour mieux nourrir les hommes. Le secteur de la nutrition animale est un secteur intermédiaire, un pont entre les filières végétales et animales, au bénéfice de notre alimentation.


En matière environnementale, la stratégie de Responsabilité Sociale des Organisations repose sur deux leviers principaux :


D’une part, l’adaptation au changement climatique : innover dans des solutions d’alimentation pour les animaux pour les aider en cas de stress thermique par exemple. C’est une question de bien-être animal et de conduite technique du cycle de l’élevage. Dans ce chapitre, on pourrait aussi citer l’impact du changement des températures sur les récoltes ou sur l’émergence de nouveaux risques sanitaires sur les récoltes des végétaux utilisés en alimentation animale.


Au titre de la maitrise des émissions favorisant le changement climatique, nous maitrisons nos process de fabrication et nous veillons à la qualité de nos produits (les aliments pour animaux) pour que ceux-ci intègrent un critère de performance environnementale. Ainsi, la lutte contre la déforestation est une action prioritaire. Nous avons, par exemple, pris des engagements forts concernant nos approvisionnements, malgré une réglementation qui peine à s’appliquer. 


Nous sommes convaincus qu’il existe des solutions techniques pour décarboner les activités et notre alimentation sans baisser la production locale – car son corollaire, le recours à l’importation, nous ferait entrer dans un cycle qui n’est vertueux ni pour nos territoires, ni pour notre économie, ni pour notre alimentation. 


Face à ces enjeux et objectifs, la formation initiale et la formation professionnelle est incontournable. Nous devons réfléchir à intégrer ces objectifs dans les parcours de formation. Cela sera utile pour la compréhension des enjeux et permettre à chacun de se les approprier. La RSE donne une visibilité et une lisibilité des objectifs. Elle donne du sens à chaque action dans un cadre commun. »

 

 

 

En clôture de cette soirée du 8 octobre Pascale Soyeux, Membre du Comité de Direction Groupe, en charge de la santé prévoyance et des accords de branches d'AG2R LA MONDIALE, a souligné l'ambition de Culture branches : réunir les forces vives et les expertises des branches professionnelles autour de questions déterminantes pour l'avenir.

« De nouvelles perspectives sur la manière dont nous pouvons, ensemble, aborder les impacts du dérèglement climatique sur le travail et l’évolution des compétences qui en découle »

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« Cette soirée du 8 octobre a été une parfaite illustration de l’ambition de Culture branches : réunir les forces vives et les expertises des branches professionnelles autour de questions déterminantes pour l’avenir. Nos échanges ont été particulièrement inspirants, ouvrant des perspectives nouvelles sur la manière dont nous pouvons, ensemble, aborder les impacts du dérèglement climatique sur le travail et l’évolution des compétences qui en découle.

 

L’intervention de Virginie Raisson-Victor, qui a su nous éclairer sur les effets du changement climatique, ainsi que les témoignages de Christian Crétier et Stéphane Radet, ont permis de traduire ces défis en actions concrètes et en engagements porteurs. Ces voix ont mis en lumière l’importance des démarches responsables et des initiatives de terrain, que ce soit pour accompagner les salariés dans des secteurs exposés ou pour innover face aux nouvelles contraintes climatiques et sociales.


Un grand merci également à Bruno Angles, dont l’engagement et le soutien au niveau du groupe AG2R LA MONDIALE dans son ensemble permettent à Culture branches de donner vie à cette plateforme d’idées et d’actions collectives. Grâce à chacun d’entre vous, nous faisons progresser la réflexion et l’action pour co-construire des solutions de protection sociale qui s’adaptent aux défis de notre époque et de nos territoires. »

A propos de Culture branches

 

AG2R LA MONDIALE propose des accords de branches santé prévoyance pour près de 110 branches professionnelles. Nos offres co-construites avec les partenaires sociaux s’accompagnent d’actions ciblées spécifiques aux besoins de chaque secteur d’activités.


Créé en 2016, Culture branches entend stimuler la réflexion sur la protection sociale complémentaire de demain. Une approche collaborative innovante d'AG2R LA MONDIALE avec les acteurs clés de la négociation collective, pour construire un modèle de couverture santé et de protection sociale robuste et solidaire.


Culture branches, c’est une communauté active de près de 1000 négociateurs qui se réunissent pour échanger, aux côtés d’experts et de professionnels engagés, sur leurs préoccupations et défis actuels.

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